5 raisons de ne pas (trop) regarder les tendances 2024 ?
16 Jan 2024 • 4 min de lecture
La nouvelle d’année marque le retour d’un grand marronnier de nos métiers de la communication et du marketing : les publications sur les grandes tendances de l’année à venir. Cet exercice d’intuition-prédiction-projection est généralement le morceau de bravoure des planneurs stratégiques. Pourtant, Thomas Bosque, planneur stratégique à l’agence, nous invite à la plus grande prudence face à ces Tops Tendances. Pour 5 bonnes raisons.
1 – Parce qu’elles ne révèlent pas les tendances fond
Les tendances de fond s’inscrivent sur un temps long, bien plus long que douze mois. Elles sont ainsi souvent invisibilisées dans le cadre des tops des tendances annuelles.
Prenons l’exemple de la seconde main. La pratique n’a rien de nouveau. Mais elle s’est structurée avec Le Bon Coin, Vinted ou BackMarket. Ces derniers mois, conséquences de l’inflation, la seconde main connait une forte progression et touche de nouveaux groupes sociaux. On voit alors des marques comme Décathlon ou Carrefour y consacrer des rayons entiers. La seconde main est donc une tendance majeure de l’année passée. Mais comme beaucoup de tendances actuelles, elle trouve ces prémices bien avant les 12 derniers mois.
C’est trop souvent cette perspective qui manque aux tops tendances annuelles ou du moins, aux synthèses qui en sont tirées. D’où l’importance et la complémentarité des baromètres comme « L’explorateur », de Moaï, institut d’étude du Groupe The Links où des tendances sont évaluées sur un temps long et avec une même méthodologie.
2 – Parce que les signaux faibles sont majoritairement voués à le rester
Soyons francs, quand on vient lire une étude « trends 2024 », on cherche de la nouveauté, de l’anglicisme qui claque voire du néologisme tiré par les cheveux. Pour ça, les études de tendances annuelles ne manquent pas de signaux faibles.
Mais rappelons que par définition, peu de signaux faibles sont amenés à devenir des tendances. La majorité sont voués à disparaitre ou à rester un usage de niche.
Prenons ici, l’exemple des DAO (Decentralized Autonomous Organisation) où des créateurs s’organisent, créent et investissent dans une marque. On est dans l’univers nébuleux et fascinant du Web3 avec une couche à la fois créative et entrepreneuriale. Le phénomène est rare, mais inspirant. On peut imaginer que ce signal faible se généralisera, mais il est plus probable qu’il reste un usage de niche.
3 – Parce qu’il y a un effet de prophétie auto-réalisatrice
Ces tendances sont suivies par les communicants et les marketeurs. Forcément, leurs prédictions deviennent parfois réalité par le simple fait qu’elles aient été énoncées. Mais le risque ici est qu’une tendance soit suivie par les marques et non par les consommateurs.
On peut prendre ici l’exemple du métavers. On l’a vu dans plein d’études de tendances annuelles et peu de temps après, des dizaines de marques ont lancé des opérations de communication en lien plus ou moins direct avec le métavers. Les études ont donc vu juste…
Le métavers a bien été une tendance marquante. Mais les utilisateurs n’ont pas suivi. En tout cas, pas au rythme annoncé. Car, une telle révolution des usages s’inscrit dans un temps long.
4 – Parce que les effets de mode s’inscrivent dans des temps plus courts
Pour être dans l’air du temps, une marque doit être capable de rebondir ou de surfer sur le sujet du moment. Mais ces effets de mode s’inscrivent dans un temps tellement court qu’elles ne peuvent pas être intégrées dans le format Top.
Prenons l’exemple du « Pantone » de l’année ou d’une tendance graphique. Une marque a quelques mois pour s’inscrire dans cette tendance. Mais pour des tendances social media, où encore plus extrême, les musiques sur TikTok ; on parle de quelques jours. Des sujets médiatiques majeurs qui pourraient concerner les marques s’inscrivent aujourd’hui dans des temps de quelques semaines.
5 – Parce que l’année 2024 est plus incertaine que d’autres
Je ne dirai pas qu’elle est plus dure que jamais. Je suis certain qu’on avait également du mal à avoir une vision juste des « trends 1942 » par exemple… Le monde a toujours été incertain.
Mais sans utiliser de superlatif donc, il semble qu’on ne peut pas juste analyser les tendances de l’année en cours pour tirer des conjectures pour l’année à venir. Les événements économiques, géopolitiques et surtout environnementaux sont moins linéaires. On arrive à des points de bascule. La part de prédiction des tendances devient donc à prendre avec beaucoup de recul.
En 2020, Wunderman Thompson Intelligence a d’ailleurs dû revoir son étude de référence « The Future 100 » en cours d’année suite à la crise du Covid-19. Cette démarche est tout à leur honneur. Je ne serais pas surpris qu’elle se répète de nouveau. Notre visibilité étant plus courte, les prédictions des tendances le deviennent aussi.
Garder à l’esprit ce qui fait sens pour votre marque et pour ses publics
Dans une période difficile comme celle d’aujourd’hui, les marques doivent montrer de la cohérence. Elles doivent être des repères, voire pour certaines, des remparts.
Cela ne veut pas dire faire du surplace ou ne pas communiquer, au contraire. Mais aller chercher des signaux (pas nécessairement faibles) qui feront entrer en résonance ce qu’est fondamentalement votre marque avec ce qui fait l’époque.
C’est pour cela que nous avons développé à l’agence, un outil et plus globalement, une démarche de mise en relation des signaux qui font notre époque avec les marques.
Parmi ces signaux, on s’intéresse justement à la fois à ceux qui s’inscrivent dans le temps long et on suit leur évolution avec les études de MOAI, institut d’étude du Groupe The LINKS. On s’intéresse également à ceux émergeants en comprenant sur quelles tendances de fond elles s’appuient.
C’est à partir de cette approche plus fine et continue des signaux qui font notre époque, qu’on travaille ensuite pour créer des connexions entre ces signaux et les marques que nous accompagnons.
Cette approche n’empêche pas de jeter un coup d’œil au prochain article #trend2024. La curiosité sera toujours une qualité dans nos métiers. Mais gardez le recul nécessaire concernant votre stratégie de marque !