Le signal du planning : Hard techno & Sped-up

07 Fév 2024 3 min de lecture

Chaque mois, Thomas Bosque, planneur stratégique à l’agence, vous invite à découvrir une tendance qui caractérise notre époque et imagine comment les marques pourraient s’y connecter.

Hard Techno

Ces dernières années, le monde de la nuit a changé de rythme. Les BPM (battements par minute) s’affolent. Les danseurs aussi. La Techno, déjà devenue mainstream, s’est endurcie. Des genres hier réservés aux raves parties comme la « Trance », le « Gabber » ou le « Hardcore », trouvent aujourd’hui leur place dans des soirées qui n’ont plus rien de confidentiel.

Si la musique électronique a déjà connu une telle accélération, cet emballement trouve son origine dans des soirées queers d’Amsterdam et de Berlin. En France, ce sont les soirées « Possession » qui ont marqué ce tournant pour tout une nouvelle génération de noctambules.

Sped-up Songs

La pop connait le même emballement. Sur TikTok comme sur Spotify, les musiques d’hier et d’aujourd’hui sont accélérées. Les voix deviennent alors aiguës, les batteries survoltées. Ces versions « Sped-up » sont parfois plus populaires que les originales.

Cette démarche n’est pas nouvelle. Kanye West s’est fait connaitre en accélérant des titres de soul. Les artistes de « nightcore » accélèrent des morceaux jusqu’à l’extrême depuis les années 2000. Mais le « sped-up » est devenu incroyablement populaire via TikTok. Et si la plateforme à l’habitude d’avaler des tendances en quelques jours, le « sped-up » reste d’année en année, forçant les artistes à sortir eux-mêmes des versions accélérées de leurs chansons.

@_speedx.songsx 21:00 | #spedupaudios #fypシ #_speedxsongsx #speedsongsfr #spedupsngxs #speedsong ♬ original sound – jax

Cela dit quoi de notre époque ?

  • Un éternel recommencement

Cette actuelle frénésie n’est pas sans rappeler celle des années 1990 où le « Happy Hardcore », la « Jungle » ou le « Gabber » (que de genres musicaux dans ce signal du planning. Je m’en excuse…) étaient à un rythme effréné. Ces mouvements et leur esthétique reviennent d’ailleurs sur le devant de la scène.

Car la musique, comme la mode, connait des cycles. Après des années de ralentissement, elle se devait de changer de rythme et d’exhumer ses succès. Les tubes de la fin des années 90 et du début des années 2000 connaissent ainsi une seconde jeunesse, en versions accélérées ou remixées. Nos désirs collectifs de nouveauté et de nostalgie se mêlent ainsi dans ce qu’on nomme la « newstalgie ».

  • Un moyen de capter notre attention

L’engouement du « Sped-up » et de la « Hard Techno » est intimement lié à TikTok et plus généralement à l’omniprésence de vidéos courtes sur nos réseaux médias sociaux. Ces musiques intenses permettent de créer des contenus courts et impactant.

En effet, nous sommes plus enclins à regarder une vidéo avec une musique accélérée, partant du principe qu’elle sera plus courte. De même, le climax des morceaux « Hard Techno », le « drop », permet de capter et retenir notre attention toujours plus courte et rare.

  • Une musique intense pour une époque intense

Malgré son absence de parole, je suis convaincu que la musique électronique dit quelque chose de notre état d’esprit collectif. La popularité grandissante d’une techno dure et rapide est une conséquence de plus des confinements du Covid-19. Comme pour la consommation, il y a eu un phénomène de rattrapage.

Mais de manière plus pérenne, les périodes difficiles engendrent une musique dure. Ce n’est pas un hasard si la Techno est née dans une ville de Detroit désindustrialisée. Cette musique « Hard Techno », née d’expériences difficiles de classes prolétaires, est cathartique pour une génération précarisée et inquiète pour notre avenir.

Le signal du planning : Hard techno & Sped-up

Comment les marques peuvent-elles se connecter à ce signal ?

La majorité des marques sont pleinement légitimes pour s’approprier les codes du « Sped-up » dans leur contenu. La publicité n’a d’ailleurs pas attendu pour redynamiser de grands classiques. Il semble en revanche plus périlleux pour la majorité d’entre elles de se rapprocher des communautés « Hard Techno », culturellement hermétiques au monde mercantile.

Mais toutes les marques doivent prendre en compte dans leur stratégie, le sentiment d’urgence et de violence qui touche une part grandissante des jeunes et sans doute de l’ensemble des Français. Face à cette réalité, à elles de trouver leur rôle : rempart, lanceur d’alerte, soutien…