Mutuelle : la vision des dirigeants, quel bilan 5 ans après ?

20 Juin 2023 3 min de lecture

Il y a 5 ans, l’agence The LINKS et Jean-Luc Gambey, directeur des publications de Vovoxx, interrogeaient les dirigeants de 20 grandes institutions mutualistes pour obtenir leur vision à 10 ans des mutuelles. C’était la naissance de « Dessine-moi une Mutuelle ». Cinq ans après, que reste-t-il de cette vision ? Qu’est-ce qui a changé  ? Qu’est-ce qui reste ancré ? On en parle avec Guillaume Robin, directeur conseil chez The LINKS.

Qu’est-ce qui est marquant pour toi sur ces 5 dernières années pour les mutuelles ? 

GR : La première chose qui saute aux yeux c’est le nombre de changements d’interlocuteurs en 5 ans. Parmi les 20 dirigeants rencontrés, seuls 6 sont restés au même poste ou dans la même structure.

Que ce soit au niveau des présidences des fédérations tutélaires, où Thierry Beaudet a laissé la présidence de la FNMF à Eric Chenu ou Pascal Demurger qui a passé le flambeau à Thierry Martel à la tête de l’AAM. Ces mêmes changements se sont retrouvés au niveau des présidences et surtout des directions générales des mutuelles. 

Dessine-Moi une Mutuelle abordait différentes thématiques dont celles des valeurs mutualistes. Le sujet est toujours d’actualité pour toi ?  

GR : Les valeurs mutualistes sont les piliers de l’existence même du modèle et à leur avenir. Sur ce point, tous voyaient l’avenir renforcer le besoin de débat démocratique, de représentativité, de construction citoyenne. L’actualité politique nous montre qu’ils ne s’y étaient pas trompés. Mais au-delà de cela, la quête de sens, d’engagement des entreprises a pris un nouveau virage depuis.

Avec l’apparition des entreprises à mission, les mutuelles se sont vues confrontées à un dilemme. Faut-il également céder à cette mode qui demande aux mutuelles peu d’efforts étant par nature entreprise à mission ? Comme l’ont été des pionnières comme MGP ou MAIF, ou au contraire éviter d’être taxé de socialwashing face à des marques aussi légitimes que Boursorama, Danone, le groupe Les Echos  / le Parisien ou le Slip Français ?

Le débat continue mais à mi-parcours le partage des valeurs et donc la communication sur ce qu’est et ce qu’apporte une mutuelle reste plus que jamais d’actualité. 

Les dirigeants évoquaient également la gouvernance et la performance, qu’en est-il aujourd’hui ?

GR : Effectivement, les présidents et directeurs généraux de ces mutuelles évoquaient il y a 5 ans, toutes les difficultés rencontrées pour répondre aux exigences économiques et réglementaires de leur marché tout en générant un bénéfice social.

C’est un point que l’on retrouve toujours au sein des mutuelles, entre une approche pragmatique, économique, marketing qui tend à privilégier des leviers usités par le marché (mutualiste ou non) et une vision politique, militante et de proximité qui souhaite apporter une réponse sociale aux problématiques des adhérents.

Il me semble plus que jamais important de réconcilier ces deux visions qui s’alimentent l’une et l’autre. Sur des marchés extrêmement concurrentiels, l’approche sociale et concrète est à la fois une source de différentiation et une finalité en termes de résultats.

L’exigence de performance se retrouve également au regard des concentrations, fusions ou nouvelles alliances des mutuelles. Il y a 5 ans déjà, on assistait aux naissances des Groupes VYV ou Aesio et depuis de nombreux regroupements ou divorces se sont passés, démontrant encore qu’au-delà des entreprises, la mutualité reste une histoire de femmes et d’hommes aux visions parfois divergentes. 

Une démarche d’innovation, de digitalisation était récurrente il y a 5 ans. Est-elle toujours d’actualité aujourd’hui.. ? 

GR : En effet, c’est une thématique qui reste toujours autant d’actualité. Hier les mutuelles pensaient devoir passer un cap : celui de la transformation digitale. Aujourd’hui, elles sont de plus en plus conscientes que cette transformation reste continue comme je le vois à la MNT.

Ce n’est pas une bascule, mais un changement culturel qui doit amener les infrastructures et les pratiques à s’adapter continuellement aux évolutions du marché et aux attentes des adhérents.

Ensuite au-delà de ces transformations, de nouvelles technologies sont apparues, transformant le quotidien, mais aussi la manière d’assurer et de protéger comme par exemple la télémédecine, l’utilisation de la data ou plus encore récemment l’intelligence artificielle qui offre des perspectives encore inimaginables à ce marché.  

Les dernières années ont également été marquées par un nouveau rapport à l’emploi. Comment les mutuelles font fassent à cette quête de sens individuelle ? 

GR : Le sujet de l’engagement était évoqué dans l’édition 2020 de « Dessine-moi une mutuelle ». Le monde mutualiste compte aujourd’hui plus de 55 000 salariés et est confronté à la même quête de sens au travail que le reste des entreprises. Mais une mutuelle de par sa raison d’être, et ses valeurs intrinsèques, possède les arguments nécessaires pour fidéliser et engager ses collaborateurs.

Pour peu qu’elle partage une vision claire de leur avenir et qu’elle prenne le temps d’embarquer toutes leurs parties prenantes, les mutuelles pourront également jouer pleinement leur rôle social de marque employeur. 

C’est quoi le grand combat de la mutualité pour les 5 prochaines années ?  

GR : Dépasser les contraintes, valoriser le modèle mutualiste, les valeurs…