IA & Communication : un vide juridique ? Vraiment ?

03 Juil 2025 3 min de lecture

Les IA génératives bouleversent la chaîne de production créative à grande vitesse. Campagnes conçues de A à Z par des modèles, prompts utilisés comme matière première, influenceurs virtuels qui s’invitent dans les briefs… Derrière l’excitation, une question revient en boucle chez les communicants : à qui appartiennent les créations générées par IA ? Ce flou soulève des enjeux concrets : droit d’auteur, confidentialité, cession des droits, responsabilité. Et renvoie chacun, agences comme marques, à un impératif : reprendre la main sur ce qui est produit.

IA générative et droit d’auteur : un nouveau terrain d’ambiguïté

L’IA générative chamboule les fondations du droit de la création. En France, le droit d’auteur est lié à la personnalité de l’auteur. Or, dans un process où l’humain « briefe » une machine plus qu’il ne conçoit une œuvre, l’originalité, au sens juridique, devient difficile à démontrer. 

Le cas est loin d’être théorique. Aux États-Unis, des œuvres générées via Midjourney ont été refusées au copyright faute d’intervention humaine suffisante. À l’inverse, une œuvre récemment validée en 2025 a pu prouver une implication humaine à chaque étape du process : choix du prompt, modifications, retouches, combinaison d’outils. 

La frontière entre création et compilation algorithmique est donc moins dans l’outil que dans l’usage. 

Propriété intellectuelle, entraînement des modèles : où sont les vrais risques ?

Le vrai sujet, c’est l’amont : les datasets d’entraînement des IA génératives. Beaucoup ont été constitués à partir de contenus glanés en ligne, souvent sans l’accord des auteurs. Résultat : toutes les images, textes ou voix disponibles sur internet ont probablement déjà été intégrées à des modèles. 

Face à ce constat, l’Europe a réagi. L’IA Act, entré en vigueur en 2024, impose deux obligations aux développeurs de modèles : 

  • publier des résumés des bases de données utilisées, 
  • respecter le « droit d’opt-out » des auteurs. 

Mais en l’état, le silence vaut consentement. Tant que l’opt-out n’est pas formulé explicitement (via CGU, clauses, ou balises techniques), le contenu peut être aspiré. 

Propriété intellectuelle IA : quels risques pour les marques ?

Toutes les IA ne se valent pas, surtout juridiquement

Chez The LINKS, l’approche est graduée selon les usages : 

  • IA standard comme Midjourney ou Leonardo pour l’exploration visuelle ; 
  • workflow avancé combinant plusieurs IA spécialisées (composition, upscale, retouches) pour les projets à fort enjeu ; 
  • entraînement personnalisé (LoRA) pour générer des visuels fidèles à des produits propriétaires. 

C’est sur ces derniers cas – quand les marques injectent leur patrimoine dans le modèle – que la vigilance doit être maximale. Et que le choix du bon outil, avec des CGU conformes aux exigences européennes, devient un véritable acte stratégique. 

Marque, agence, IA : vers un nouveau contrat de création

Derrière les questions juridiques, c’est une nouvelle culture de la création qui s’installe. Plus modulaire, plus technique, mais aussi plus traçable. 

Tracer le process, documenter les choix créatifs, associer les parties prenantes dès le brief… Ces pratiques, encore peu familières aux agences, deviennent essentielles pour justifier la propriété d’un visuel ou la cession de droits à un client. 

L’enjeu est double : 

  • Pour les marques : éviter que leurs inputs soient recyclés par les IA tierces. 
  • Pour les agences : sécuriser la valeur de ce qu’elles produisent, face à des outils qui normalisent et industrialisent la création.

Ce que l’IA impose aux communicants : exigence, transparence, maturité

L’illusion d’une IA magique, qui génère en un clic des campagnes prêtes à l’emploi, ne résiste pas au test du réel. Contrairement aux promesses des éditeurs, il faut souvent : 

  • combiner plusieurs outils, 
  • ajuster manuellement les outputs, 
  • retoucher les visuels pour les rendre exploitables. 

C’est dans cette phase de reprise, d’exigence créative, que la valeur et les droits  se construisent. Et c’est elle qui fera la différence demain entre un simple utilisateur de prompts et un véritable créateur augmenté.