GenZ, Boomers… : et si les marques faisaient fausse route ?
27 Mar 2023 • 3 min de lecture
Nous décryptons à peine les comportements de la GenZ, que l’on commence déjà à parler de la suivante : la génération Alpha. Ces mutations sont suivies de près par les communicants. Mais le faisons-nous de manière efficace ? Quelle doit être la place de cette approche générationnelle dans les stratégiques de communication ? Le point avec Thomas Bosque, planneur stratégique chez The LINKS.
En quoi l’analyse des générations est-elle importante en planning stratégique ?
On ne peut pas faire abstraction de ses critères de générations au vu du flot d’études sur le sujet et de leur place dans l’actualité médiatique. En effet, au-delà de trends comme « Ok Boomer », la crise du covid ou aujourd’hui la réforme des retraites mettent le sujet des générations à l’ordre du jour.
Mais on accorde trop d’importance à cette lecture générationnelle. C’est la thèse de Vincent Cocquebert dans son livre : « Millenials Burn out : comment l’arnaque des générations consume la jeunesse ». L’essai a bientôt 5 ans, mais me semble toujours aussi pertinent pour comprendre les causes et les conséquences de notre obsession générationnelle.
Quel est le problème de cette lecture générationnelle ?
Premièrement, c’est une forme d’essentialisation. On réduit des individus à certains attributs : « les millenials ne veulent pas bosser », « le baby-boomer est réac »… Ces discriminations sont encore socialement acceptées alors que tout le monde en est victime.
Ces raccourcis deviennent également à terme, des prophéties autoréalisatrices. Ils nous enferment dans des rôles, notamment dans le cadre du travail. Ces problèmes se répercutent de génération en génération. Le cliché du narcissique, zappeur, mais engagé, hier associé aux millenials, est aujourd’hui projeté sur la Génération Z et demain sur les Alpha.
Comment expliquer ce glissement des clichés associés aux générations ?
On confond ici effet de génération (ce qui serait vraiment propre aux personnes nées à une période précise) et effet d’âge (ce qui est lié au fait d’avoir un certain âge, de tout temps).
Le fait de vouloir s’affranchir de certaines normes, d’apporter de l’importance à son identité, ce n’est pas spécifique à une génération, c’est être jeune, tout simplement. Socrate écrivait déjà que la jeunesse de son époque se moquait de l’autorité et des plus anciens.
Différencier ce qui revient à la génération et à l’âge est donc une première clé pour éviter certains raccourcis en marketing et en communication.
Les marques devraient-elles faire abstraction de la lecture générationnelle ?
Ne rejetons pas tout le concept de génération non plus. Il faut simplement ne pas le voir partout. Par exemple, on associe trop souvent de nouveaux usages aux nouvelles générations.
Prenons notre rapport au travail. On associe beaucoup ses récentes mutations à la GenZ. Pourtant, ça ne me semble pas être les seuls qui réinterrogent aujourd’hui la place qu’à notre travail dans nos vie. On confond ici effet de génération et effet d’époque (ce qui appartient traverse l’ensemble de la société).
Pourquoi on focalisons-nous tant sur ces générations désormais ?
Cela nous donne des repères à une époque où on en manque tous. Ce n’est pas un hasard si cette lecture générationnelle est venue à un moment où on a commencé à gommer celle de classe sociale.
Cette approche dépolitisée, on la retrouve trop souvent dans la sphère médiatique. Mais, il faut aussi balayer devant notre porte : nous, communicants et marketeurs, avons le mauvais réflexe d’annoncer régulièrement des révolutions pour justifier des investissements. Ce qui, sur le long terme, ne sert ni la perception des individus ni la pertinence des marques.
Comment les marques peuvent-elles dépasser ces stéréotypes ?
On a vu également qu’il fallait dissocier l’effet de génération, d’âge et d’époque. Il existe également d’autres critères : le capital économique, le capital culturel, le lieu d’habitation sont des critères de segmentation classiques, mais complémentaires. D’ailleurs, les sociologues ayant théorisé le principe de génération avaient très vite perçu la limite du seul critère de l’âge et dissociaient déjà les paysans et les urbains par exemple.
Mais il est temps d’aller plus loin. On n’a jamais eu autant d’outils pour dépasser le ciblage par âge. Intéressons-nous davantage aux usages et aux communautés. Le fait de vouloir un jour découvrir l’Inde, d’être amateur de Science-fiction ou d’être habitué de paris en ligne, en dit souvent plus sur un individu, sa vision du monde, son rapport à la consommation et aux marques, que le fait d’avoir 20, 40 ou 60 ans.
C’est cette juste compréhension des usages et des communautés qui permettra aux marques de créer et d’entretenir un lien émotionnel avec leurs publics.